Fév 2022
A propos de Jeanne Goutelle
Créatrice textile, Jeanne Goutelle est exploratrice des matières et des couleurs et s’appuie sur ses compétences artistiques et techniques pour porter une autre vision sur l’upcycling. Son travail se situe aux frontières de l’art, de l’artisanat et du design avec une dimension architecturale. Lauréate de la Fondation Banque Populaire en 2020 et du Prix « coup de cœur » du jury pour le projet RE-WEAVE, Techtera en 2019, elle a déjà présenté son travail à La Manufacture de Roubaix, à la Biennale Emergences de Pantin ainsi qu’à la Biennale Internationale du Design Saint-Etienne.
En 2017, Jeanne Goutelle crée Jeanne Goutelle Atelier, à Saint-Étienne dans la Loire, fleuron historique de la passementerie et de la rubannerie.
1 . Comment devient-on créatrice textile et qu’est-ce que cela signifie en 2021 ?
JG : J’ai grandi dans un univers créatif avec une grand-mère paternelle modiste, un grand-père maternel directeur d’une entreprise de tissage Jacquard et des parents architectes. Je crois que mon parcours est une sorte de synthèse des parcours professionnels de mon entourage proche. Je savais très jeune que je voulais travailler dans la création textile et j’ai suivi le cursus scolaire d’Arts Appliqués dès le lycée pour y parvenir (…). J’ai créé, en 2017, mon projet sous l’identité que je défends aujourd’hui et qui a comme point d’ancrage le réemploi de matières textiles que l’on appelle « chutes de production ou stocks dormants ». Aujourd’hui, je conçois tous mes projets dans une approche d’upclycling pour redonner vie à des matières délaissées de la plus belle manière qu’il soit.
2 . Quelles sont vos sources d’inspiration à l’heure de la transition écologique ?
JG : Mes sources d’inspiration se situent dans l’art en général, la nature et souvent dans des manuels anciens de techniques artisanales. La couleur a aussi une grande importance et dans ce cas, la nature comme la peinture peuvent devenir des points de départ pour mes créations. Mais ma plus grande source d’inspiration reste les gisements de matières et les stocks inutilisés que je trouve chez mes fournisseurs et clients.
3 . Comment vous êtes-vous retrouvée à collaborer au projet d’aménagement scénographique du Conseil de l’Union européenne pour la présidence française ? Qu’est-ce qui vous a motivé dans ce projet ?
JG : Les hasards de nos réseaux professionnels m’ont fait rencontrer Adeline Rispal début 2021 (…). Quand le projet pour le Conseil de l’Union Européenne s’est présenté et qu’elle m’a contactée pour construire ensemble ce que pourrait être une métaphore entre le textile et l’Europe, j’ai tout de suite saisi l’opportunité de pouvoir parler du textile autrement, notamment de l’artisanat, du réemploi de matière et finalement de toute une filière.
4 . En quoi les paravents que vous créez pour les salons de la présidence française du Conseil de l’Union européenne font-ils écho au projet scénographique général et s’insèrent-ils dans la symbolique de L’Étoffe de l’Europe® ?
JG : Le projet scénographique des Ateliers Adeline Rispal et de Si / Studio irrésistible a été pensé dès le départ sous la forme d’une trame textile, métaphore des réseaux européens (…). Ma proposition de tissage des paravents à l’échelle l’architecture met en avant la symbolique forte des réseaux, des relations humaines, des déplacements et des liens européens. Le travail de la main et les techniques artisanales font écho à la diversité des visages et des savoir-faire de la France. Toutes les techniques d’entrecroisement employées marquent les différentes trajectoires, les rassemblements, les convergences et les contrastes de nos territoires. La gamme de couleurs de bleus, de blancs et de rouges reflète toutes les nuances de la France (…). Les paravents répondent à l’envie de créer une atmosphère plus chaleureuse dans les salons présidentiels et les espaces de discussion.
5 . En quoi cette réalisation se distingue-t-elle de vos précédentes ?
JG : Cette réalisation a été conçue et fabriquée intégralement dans un rayon de vingt kilomètres autour de mon atelier pour montrer qu’il est possible de trouver des savoir-faire très pointus localement, en France et dans une filière que l’on considère bien trop souvent comme faisant partie du passé.
Intersection(s), une ligne de paravents spécialement créée par Jeanne Goutelle pour L’Étoffe de l’Europe®
Dans le cadre du projet d’aménagement des salons du Conseil de l’Union européenne pour la Présidence française, plusieurs créations ont été commandées à la créatrice textile Jeanne Goutelle. En droite ligne avec le concept global de L’Étoffe de l’Europe®, l’artiste conçoit 5 paravents, composés de 18 panneaux, à travers un tissage architectural de sangles et de rubans issus des rebus de l’industrie textile stéphanoise. Ses alcôves tissées, baptisées Intersection(s), viennent dialoguer avec les pièces du Mobilier national.
Paravents tissés : les liens européens
Les tissages de sangles et les entrecroisements rubanés qui habillent les paravents de Jeanne Goutelle symbolisent les liens entre les différents pays de l’Union Européenne. Ces paravents sont fabriqués à partir d’une structure autoportante en acier, laquelle est remplie d’un grillage soudé formant un quadrillage de 5 cm de côté. Sangles et rubans sont tissés à travers cette grille dans différentes directions. Ils sont, à différentes échelles, représentatifs des relations humaines, des flux réels et virtuels et des déplacements de personnes ou de marchandises.
Couleurs et matières : toutes les nuances de la France
La gamme de couleur retenue pour la sélection des rubans s’inspire des couleurs du drapeau français et s’articule autour d’une diversité de bleus, de blancs et de rouges. Les matières collectées, soigneusement sélectionnées, sont composées de coton et de polyester permettant des jeux de brillance en contraste des mats. Toutes les matières premières textiles sont ignifugées pour un classement au feu de type Ml.
Tapisserie contemporaine : une atmosphère chaleureuse
Présentés comme des décors muraux, les œuvres textiles de Jeanne Goutelle ont l’avantage d’améliorer l’acoustique des espaces dans lesquels elles sont installées et de créer une atmosphère plus intimiste et chaleureuse. Ce travail de tissage mural s’inscrit dans le renouveau des arts textiles et notamment dans celui de la tapisserie en hommage au savoir-faire développé dans les tapisseries d’Aubusson utilisées à l’époque pour leurs propriétés isolantes.
Lumière : des jeux de transparence
En contre-jour devant les fenêtres ou transpercés par l’éclairage, les tissages des paravents révèlent des ombres à travers les vides et des pleins créés par les motifs d’entrecroisement. Ces combinaisons de lumière viennent jouer sur les sols, les murs et les plafonds comme des motifs lumineux.
Production responsable : le remploi des chutes de production
Les paravents sont réalisés à partir de chutes de production de l’industrie textile stéphanoise SATAB (partenaire industriel de longue date de Jeanne Goutelle) et ne nécessitent donc pas de transport superflu ou de création de matière et pourront être conservés à l’issue de la gouvernance française. Ces différents aspects en font une création durable et reflètent l’engagement responsable de l’artiste.
Retrouvez le projet entier –> L’Étoffe de l’Europe®